En Coulisse • La note d’intention du réalisateur de SOUND OF METAL.

« J’ai commencé à écrire SOUND OF METAL il y a huit ans, mais le projet existe depuis longtemps, et est né d’une collaboration avec mon ami et partenaire d’écriture, Derek Cianfrance. Il s’agissait à l’époque d’un documentaire hybride sur un vrai couple dans un groupe de metal. Les prémices de ce projet avorté ont donné le film d’aujourd’hui.

De nombreux aspects de ce projet ont toujours été des inspirations pour moi : l’exploration cinématographique d’un point de vue sonore, mon attirance pour une folle histoire d’amour qui évolue au gré du temps et des épreuves… Mais les thèmes les plus importants de ce film se sont dessinés au fil des années et des nombreuses versions du scénario – en particulier depuis que mon frère Abraham m’a rejoint dans le processus d’écriture.

Abraham et moi avons passé des années à explorer les vérités profondes de la musique et de l’histoire et des personnages – certains inspirés par notre propre famille. Notre grand-mère, New-Yorkaise juive, lesbienne, photographe et cinéphile est devenue sourde à soixante ans après une prise d’antibiotiques. Elle s’appelait Dorothy Marder, et bien que déjà solitaire, elle s’est retrouvée piégée entre deux cultures, les entendants et les sourds. Elle a passé les dernières années de sa vie à militer pour la généralisation du sous-titrage en version sourds et malentendants dans les films. SOUND OF METAL est dédié à sa mémoire.

Bien que la route vers le tournage de SOUND OF METAL ait été longue et difficile, il est aujourd’hui clair pour moi que chaque faux départ et chaque déception m’a conduit à réaliser un film qui je l’espère est bien meilleur, surtout en ce qui concerne le casting. Trouver Riz Ahmed pour le rôle de Ruben était à la fois inattendu et révélateur. Son engagement était total, et quatre mois avant le tournage, Riz a déménagé à New-York pour travailler avec moi, apprendre la batterie et la langue des signes avec la communauté des sourds et malentendants de Brooklyn. Il s’est plongé dans un processus émotionnel et physique qu’il qualifierait, je pense, de profondément bouleversant.

Ce film a été tourné dans l’ordre chronologique, pour que les acteurs puissent vivre pleinement les différents tournants émotionnels de l’histoire, et la musique live dans le film était jouée en direct sur le plateau. Nous souhaitions faire un film authentique et viscéral, en mettant en scène des expériences réelles et brutes. 

Cette histoire est également un moyen de parler d’une culture et un mode de vie qui concernent tant de personnes : sourds, malentendants et EEPS (Enfant Entendant de Parents Sourds). Pour se rapprocher au maximum d’une sensation physique de surdité, Riz portait dans ses oreilles des appareils auditifs qui émettaient un son d’intensité variable, provoquant un ressenti de perte progressive de l’audition, jusqu’à ne plus entendre sa propre voix. 

Bien que le cinéma soit une imitation du réel, ce film a été pleinement vécu par ceux qui l’ont fait devenir ce qu’il est. J’espère désormais que SOUND OF METAL soit pour le public une expérience viscérale de cinéma, et de réalité. »

Darius Marder